Au même titre que la littérature jeunesse, le jeu vidéo cultive un terreau toujours fertile : celui de l’imaginaire. Endosser le rôle d’un prince, d’une aventurière, explorer des terres inconnues, cela fait toujours son effet. Qu’en est-il d’un jeu qui vous donne la chance d’incarner le rôle de deux points de ponctuation ? C’est la proposition de Type:Rider, un jeu de plates-formes produit par Agat-Ex Nihilo et Arte.
Les enfants flânent à la bibliothèque, ils observent du coin de l’œil un ballet qu’ils connaissent bien. La salle des tout-petits se transforme une énième fois sous leurs yeux : les rideaux se tirent, les coussins s’époussettent et le vidéoprojecteur illumine un grand drap blanc servant d’écran géant d’appoint. Les bibliothécaires ouvrent les portes et les enfants s’installent, s’agitent et entretiennent une curiosité collective : l’histoire de deux points ? La typographie ? Comment jouer ? Les bibliothécaires expliquent, ne s’attardent pas, ils effectuent le tutoriel et s’effacent. C’est aux enfants de jouer.
Images, sons et mouvements, à l’écran, captent l’attention de ceux qui regardent, qui contemplent. Tout le monde joue, tour à tour. L’expérience est à la fois audible et collective : fais pas ci, fais pas ça, c’est à moi de jouer, dommage, essaie encore. Le jeu propose une expérience et oppose une résistance. Les enfants s’adaptent, s’entraident et réussissent. Des applaudissements retentissent, les joueurs se félicitent de surmonter ensemble des obstacles. Tout est à leur hauteur, ils le prouvent encore une fois.
Collaborer du bout des doigts…
Le gameplay de Type:Rider est à la fois simple et déroutant : deux boutons de direction (droite et gauche), un bouton de saut. Mais il s’agit d’incarner deux points de ponctuation qui ont une physique particulière qu’il faut dompter pour résoudre les casses-têtes et survoler les plates-formes. Plusieurs approches furent testées par les bibliothécaires :
Les enfants n’abandonnent jamais.
Type: Rider est un jeu exigeant et son gameplay est perfectible. La difficulté est aléatoire et les échecs peuvent frustrer. La physique des deux points à contrôler, les plates-formes qui nécessitent une manipulation optimale. Le jeu n’est pas aisé à prendre en main. En théorie, Type: Rider ne devrait pas convenir à des enfants en groupe (dans une tranche variable : cinq à douze ans). En théorie.
Quand une dynamique de groupe s’installe en amont et que les bibliothécaires peuvent aiguiller, avec parcimonie, tout est possible. Une animation vidéoludique en bibliothèque, cela reste la proposition d’une expérience de jeu. Cette dernière est plus ou moins enrichissante en fonction des mécanismes de gameplay qui sont en place. La difficulté est l’un de ces mécanismes et elle n’éloigne pas les enfants, au contraire. Faisons-leur confiance.
Une porte ouverte
Type: Rider n’est pas proposé à La Petite Bibliothèque Ronde car il bénéficie de l’aura culturelle d’Arte. Non, Type: Rider est avant tout proposé car c’est un très bon jeu vidéo et qu’il permet d’exploiter de nombreuses pistes de médiation. Ce jeu donne la possibilité de découvrir l’histoire de la typographie subtilement (en jouant) ou plus directement (une documentation abondante sur la typographie accessible via le menu du jeu). Est-ce que les bibliothécaires doivent « forcer » les enfants à lire la documentation ? Une démarche différente fut abordée :
Faire confiance aux structures strictement multimédias du jeu vidéo : le son, l’image, le texte, les mécanismes ludiques et narratifs. Les tableaux de Type:Rider sont suffisamment classieux et subtils pour titiller la curiosité des enfants : C’est quoi l’écriture dans ce monde ? C’est quelle époque ce niveau ? Comment elle s’appelle la grosse machine qui fait des lettres ? On n’en demandait pas tant. Le jeu a ouvert une porte et les bibliothécaires pouvaient ensuite aisément prendre le relais en utilisant des abécédaires et des documentaires sur la question pour entretenir la curiosité enfantine.
Vous pouvez retrouver la fiche de l’application sur BibApps : Type:Rider